On ne retrouve guère plus qu’en filigrane, dans “III”, ce qui fait ou fit l’identité musicale des différentes formations de Primevere, aka Romain Benard (pele-mele : Ropoporose, duo formé avec sa soeur pendant près de dix ans ou encore Namdose, Braziliers, Paradoxant, Milk TV, Fondry & Ada Oda). Pas de dissidence ici ; plutôt la volonté, pour ce batteur de formation, d’étendre un peu plus ses rameaux vers un artisanat de chansonnier autodidacte.
Comme ses prédécesseurs, “III” est un autoportrait latent de son auteur. Un album composé et bricolé en solitaire pendant deux ans, entre Vendôme et Bruxelles, terre d’accueil du musicien. On reconnaîtra, des introductif Cérémonies, une admiration non feinte pour l’actuelle scène indie-pop anglo-saxonne : l’élégance mélodique d’une Cate Le Bon et, surtout, ce goût pour l’épure et la forme juste chère à la néo-zélandaise Aldous Harding. Dans son sillage, Romain a choisi d’explorer la pop sans prodigalité, avec le souci du geste pondéré. D’équilibre et de mesure, il est aussi question dans l’écriture des paroles. A l’instar de Bertrand Belin ou Stéphane Milochevitch, Romain a décidé de privilégier aux grandes routes narratives les chemins encailloutés du rêve. Ici et là, l’écriture se teinte d’une certaine retenue impressionniste, d’un onirisme descriptif composant une cartographie singulière ou les souvenirs, les sensations et les rêves s’entrecroisent et font naître des histoires aveugles. De la chambre à la cime des clochers, de la folk intimiste à la pop orchestrale, ces douze chansons étendent leurs rameaux et prolongent une œuvre singulière où chaque trace, chaque sentier semblent révéler un peu plus le monde qu’ils habitent.